La plateforme Doctolib est une start-up française de prise de rendez-vous avec un médecin ou un autre professionnel de santé ainsi que d’annuaire en ligne. Elle permet de trouver plus facilement un médecin ou un professionnel de santé proche de chez vous et disponibles rapidement. La prise de rendez-vous en ligne est facile, gratuite pour le patient, elle est payante pour le professionnel de santé.
Faute de mieux, de nombreux patients et professionnels de santé se sont engouffrés dans la gueule de cette startup mais arrêtons nous deux minutes pour réfléchir au revers de cette belle réussite financière…
Doctolib dans la tourmente
Les sites et applications de prise de rendez-vous médicaux commencent à agacer les médecins. Le syndicat MG France a fait part de son étonnement dans un communiqué envoyé à ses adhérents. Il reproche à l’un d’entre eux la sollicitation des patients par un mail expliquant : « Votre praticien souhaiterait connaître votre avis sur votre rendez-vous ».
Plusieurs critères : le temps d’attente, la qualité du contact humain, la clarté des explications, le cadre et la propreté, et un niveau de recommandations – les quatre derniers critères recevant une note de 1 à 5. « Acceptez-vous que vos patients reçoivent cela ? », demande MG France.
La notation des médecins, ça ne passe déjà pas pour beaucoup de praticiens. Mais Doctolib – car c’est la plateforme dont il s’agirait, même si le syndicat ne le précise pas – en rajouterait une couche, signale le syndicat : le mail envoyé aux patients présente le médecin consulté comme expéditeur !
source : https://www.whatsupdoc-lemag.fr/article/doctolib-dans-la-tourmente
Le succès de Doctolib, est-ce grave docteur ?
La principale cible de la société sont les professionnels libéraux qui s’abonnent pour 129 € par mois. Si les médecins sont majoritaires, on y trouve aussi des dentistes, des kinés, des psychologues, des ostéopathes… « C’est un premier problème. Sur un site qui s’appelle doctolib, on s’attend à ne trouver que des docteurs. Or, là, on trouve de tout y compris des naturopathes qui, dans leur fiche de présentation, ont parfois un discours tendancieux pouvant laisser penser qu’ils sont médecins », dénonce le docteur Jérôme Marty président de l’Union française pour une médecine libre. « Dans le cas des naturopathes, nous précisons à chaque fois qu’il s’agit là d’une profession non réglementée », indique Arthur Thirion.
Mais Doctolib fait aussi affaire avec les hôpitaux publics. Et son plus gros coup a été la signature en 2016 d’un partenariat avec l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). « Nous souhaitions faciliter la prise de rendez-vous pour les patients dans nos hôpitaux et rendre plus visible notre offre de soins auprès du public. Doctolib a été choisi après un appel d’offres, pour une durée de quatre ans. Sur la durée du marché, ce partenariat coûtera entre 1 et 2 millions d’euros », explique Raphaël Beaufret, directeur du pilotage et de la transformation de l’AP-HP. Dans la foulée, Doctolib a conclu des accords avec une centaine d’hôpitaux publics, dont les CHU de Rouen, Nancy, Montpellier, Nantes, Lille et Nice.
Combien de Français utilisent-ils ses services ? « Plus de 12 millions chaque mois », indiquait en 2017 l’entreprise qui, aujourd’hui, ne souhaite plus donner de chiffres. « Ce qu’on peut dire, c’est que, le mois dernier, nous avons eu 35 millions de visites », précise Arthur Thirion. Un chiffre très élevé qui suscite des interrogations. « Il y a dix ans, 90 % des généralistes recevaient des patients sans rendez-vous. Aujourd’hui, nous ne sommes plus qu’une minorité à accepter des patients en consultation libre. Et cette évolution est liée en bonne partie à Doctolib qui a largement systématisé la médecine sur rendez-vous », indique Bertrand Legrand, généraliste à Tourcoing et fondateur de l’application Vitodoc, qui permet aux patients de consulter sur des plages horaires libres.
« Son caractère hégémonique pose problème »
Comme lui, certains dénoncent aussi une « ubérisation » de la santé. « Cela encourage le consumérisme médical », estime le docteur Marty. « Doctolib semble plaire aux patients branchés, connectés, modernes, ceux qui commandent leurs chaussures sans les avoir essayées et qui peuvent les renvoyer si elles ne leur plaisent pas », écrit un généraliste qui tient un blog anonyme sur Internet. Mais ces critiques ne troublent guère les utilisateurs du site. « C’est juste simple et efficace. Plus besoin de passer des heures au téléphone pour trouver une place disponible chez un médecin », dit Véronique, une mère de famille parisienne.
Certes, tous les médecins ne sont pas abonnés à Doctolib. « Mais son caractère hégémonique pose problème », assure le docteur Jean-Bernard Rottier, ophtalmogue au Mans. « Imaginez le cas d’un patient qui tape “ophtalmologue Paris” sur Google, ajoute-t-il. Un médecin, qui n’est pas abonné à une plate-forme de rendez-vous n’a aucune chance d’apparaître sur la première page. Donc soit vous êtes à Doctolib, soit vous perdez toute visibilité sur Internet », ajoute ce médecin.
Des données inaccessibles à Doctollib
Une autre question est celle de l’avenir des secrétaires médicales. « Elle est là la vraie raison du succès de Doctolib. Les médecins s’abonnent pour diminuer leurs frais de secrétariat. Ce qui est un vrai recul. Car une secrétaire, c’est une personne qui connaît l’histoire des patients et leurs besoins », explique un généraliste qui exerce à Mantes-la-Jolie. Un constat nuancé par le docteur Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, le principal syndicat de médecins libéraux. « Je suis abonné à Doctolib et j’ai gardé ma secrétaire. Le fait de recevoir moins d’appels pour les rendez-vous lui permet de se libérer pour d’autres tâches, notamment l’accueil des patients », explique ce médecin, qui exerce comme néphrologue à Cabestany.
« En fait, l’impact de Doctolib reste difficile à mesurer. Davantage que ces plateformes, ce qui va nous coûter des emplois, c’est le développement des logiciels de reconnaissance vocale, permettant aux médecins de dicter leur compte rendu ou leur courrier sur un logiciel qui met tout par écrit », indique Christine Gavard, responsable pédagogique à l’Association des secrétaires médico-sociales à l’ASMR.
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